RAPPORT HEBDOMADAIRE 05

Contexte général

Après la levée partielle des sanctions sur le Mali, le 3 juillet 2022 par la CEDEAO, les autorités de la transition ont commencé la mise en œuvre des réformes politiques et électorales. Les activités liées à la rédaction de la nouvelle constitution et à la mise en place de l’Autorité Indépendante de Gestion des Élections (AIGE) ont démarré.

Cependant, le Mali connaît actuellement une aggravation de la crise sécuritaire et des tensions politiques.

  1. Le contexte politique

Le contexte politique est marqué par les vives réactions de la classe politique malienne suite aux déclarations du premier ministre Dr Choguel Kokalla MAÏGA, relayées sur les réseaux sociaux, appelant les « forces du changement » à se mobiliser pour gagner les élections devant marquer la fin de la Transition.

Le Cadre d’échange des Partis et Regroupement de Partis Politiques pour une Transition Réussie au Mali, à travers une déclaration en date du 21 juillet 2022, a demandé la démission immédiate du Premier ministre en réaction à ses propos. Le Cadre estime qu’il est un « Premier ministre clanique, agissant contre l’esprit de la Transition. »

D’autres déclarations ont également été faites par des partis politiques pour dénoncer les propos tenus par le chef du Gouvernement. À titre d’exemple, le parti ADEMA-PASJ, dans son communiqué du 22 juillet 2022, qualifie les propos du Premier ministre de « déclaration malencontreuse » avant de lui demander « de faire preuve de courage pour démissionner de ses fonctions sans délai ». Le parti YELEMA, dans son communiqué en date du 21 juillet, se dit « outré » par les propos du Premier ministre et rappelle au chef du Gouvernement « que le temps des compétitions électorales viendra ».

Quant au M5RFP, il affirme que ces partis « se sont trahis en dévoilant leur vraie nature qui est fondamentalement contre le Changement, le Mali Kura et la réussite de la Transition contrairement à ce qu’ils déclarent urbi et orbi ».

Le contexte politique est également marqué par le processus d’élargissement du Conseil national de Transition (CNT), suivant le décret N°2022-0427/PT-RM du 21 juillet 2022 fixant clé de répartition et de désignation des membres additifs du Conseil National de Transition. Et cela, conformément à l’article 13 nouveau de la Charte de la transition révisée suivant lequel le Conseil national de Transition est l’organe législatif de la Transition. Il sera composé de cent quarante-sept (147) membres au lieu de cent-vingt et un (121) membres.

Par un communiqué en date du 25 juillet 2022, le parti YELEMA déplore l’adoption de ce décret au motif que cet élargissement engendrera des charges supplémentaires, alors que le maître-mot devrait être la réduction du train de vie de l’État.

Suivant le Communiqué N°001/PG-CSM, en date du 28 juillet 2022, le Procureur Général de la Cour Suprême du Mali a informé l’opinion publique nationale et internationale qu’un mandat d’arrêt international a été lancé, depuis le 25 juillet 2022, contre Messieurs Boubou Cissé (ex ministre de l’Économie et des finances), Tiéman Hubert Coulibaly (ex ministre de la Défense nationale), Mamadou Diarra dit Igor (ex ministre de l’Économie et des finances) et Babaly Bah (ex patron de la Banque Malienne de Solidarité -BMS-sa). Ils sont poursuivis pour crime de faux et usage de faux, d’atteinte aux biens publics et de complicités de ces infractions, des faits liés à l’affaire du marché public concernant la mise en œuvre de la loi d’orientation et de programmation militaire ainsi que la loi de programmation sur la sécurité intérieure.

La MODELE observe que les trois premiers sont des acteurs majeurs de la scène politique malienne.

  1. Le contexte électoral

Le jeudi 21 juillet, les ministres de l’administration, de la refondation et délégué auprès du Premier ministre ont rencontré la classe politique autour des modalités de désignation de leur quatre (4) représentants au Collège de l’AIGE, organe dirigeant de l’Autorité, conformément à l’article 7 de la loi électorale. Cependant, après des débats houleux, il n’y a pas eu de consensus autour des critères de désignation.

Le vendredi 22 juillet, une rencontre similaire a eu lieu autour des propositions faites par les organisations de la société civile. A ce niveau un consensus a été dégagé : appel à candidatures concernant les organisations évoluant dans le domaine de la démocratie, la gouvernance et les élections, respect de la loi sur le genre et comité de sélection au niveau du Conseil National de la Société Civile pour conduire le processus de désignation des trois (3) membres. La société civile voulait communiquer les noms de ses membres le lundi 25 juillet, comme prévu dans le courrier du MATD, mais le gouvernement leur a demandé d’attendre son retour.

La MODELE rappelle que suivant le chronogramme du MATD du 27 juin 2022, l’adoption du décret de nomination des membres du Collège de l’AIGE était prévue pour le 13 juillet 2022. Les retards pris dans la mise en place de l’AIGE pourraient impacter négativement sur le respect des délais de la Transition.

  1. Les réformes constitutionnelles

La commission de rédaction de la nouvelle constitution installée le 12 juillet 2022 a initié des séances d’écoute avec des partis politiques et des organisations de la société civile.  

Le mardi 24 juillet 2022, la commission a écouté les partis politiques pour recueillir leurs contributions afin de les prendre en compte dans l’avant-projet de loi constitutionnelle.

On retient que certains partis politiques se sont opposés au processus de rédaction d’une nouvelle constitution et même à l’idée d’une révision de l’actuelle. C’est le cas de l’ADEMA-PASJ et Espérance DJIGIYA COURA qui est un regroupement de partis piloté par la CODEM.

Le jeudi 28 juillet 2022, la commission a rencontré certaines organisations de la société civile dans le même but. Des écoutes régionales sont prévues le 2 août et des consultations en ligne.

La MODÈLE estime qu’il faut davantage de consensus et d’inclusivité dans le processus de consultation, étant entendu que des organisations spécialisées en la matière n’ont pas été approchées.

  1. Le contexte sécuritaire

Cette semaine a été marquée par des attaques dans plusieurs localités du pays. On dénombre 11 attaques terroristes, dont 2 à proximité de Bamako.

Dans son communiqué N° 052 du 27 juillet, le Chef d’État-major général des armées maliennes appelle l’opinion à ne pas se laisser tromper par « les récentes gesticulations d’un adversaire en perte de vitesse ». Selon lui : « ces groupes armés démontrent en réalité leur affaiblissement global en procédant à des actes désespérés d’attaques Kamikazes, d’exactions sur les populations civiles et des poses d’engins explosifs improvisés ».

Le jeudi 28 juillet 2022, Mahamoud Barry Alias Abou Yahya, numéro 2 de la Katiba du Macina, affiliée au Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans (GSIM), a affirmé qu’il n’y aura pas de répit tant que le Mali n’appliquera pas la charia islamique.

Les recommandations :

La MODELE Mali recommande :

  • La neutralité des autorités de la transition dans la conduite du processus électoral ;
  • Davantage de diligence dans la mise en place de l’Autorité́ Indépendante de Gestion des Élections (AIGE), pour le respect des délais de la Transition ;
  • Davantage de consensus et d’inclusivité dans le processus de consultation et d’écoute des parties prenantes ;
  • La poursuite des efforts de sécurisation des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire national, dans le respect des droits de l’Homme et du Droit International Humanitaire.